Doit-on respecter et suivre les lois en Colombie ?

Doit-on respecter et suivre les lois en Colombie ?

Faut-il respecter les lois et les règles en Colombie ? La réponse est forcément oui, sinon nous serions illégaux et risquerions l’amende ou la prison. Cependant, il faut la nuancer. Il y a une espèce de zone grise qu’un étranger, investisseur ou entrepreneur, devra appréhender assez rapidement.

Au-delà du titre provocateur, c’est plutôt une situation à laquelle nous sommes tous vite confrontés.

 

Le contexte

 

En premier lieu, il faut bien comprendre que la Colombie croule sous les lois, normes et règlementations diverses. Le nombre de sénateurs (108) et congressistes (172) est absurdement élevé et ils passent leur temps à en créer de nouvelles sans jamais en éliminer. Entre les 20 codes juridiques existants, les experts estiment que plus de 15’000 lois sont superflues, certaines sont même devenues absurdes avec le temps. Avec 400 avocats pour 100’000 habitants, la Colombie a un besoin exagéré d’hommes de lois pour s’y retrouver. C’est 3 fois plus qu’au Chili par exemple, qui en compte 125.

Comme vu dans l’article précédent (Pourquoi l’Amérique latine est plus pauvre que l’Amérique du Nord), les lois ne sont pas créées dans l’intérêt du peuple et son développement économique. Les politiciens font partie de l’élite et les nouvelles normes ont tendance à les favoriser. Plusieurs lois sur un même sujet créent un flou qui permet de les contourner sans être complétement en marge.

 

Il y a un but peut-être louable de vouloir établir des standards de qualité mais chaque permis ou inspection à un coût à la charge du commerçant. Ce sont à chaque fois des impôts, des charges administratives d’inspection ou de nouveaux équipements obligatoires qu’il faut assumer.

Bien sûr, la longue histoire de la Colombie face aux activités criminelles oblige à être prudent et instaurer des contrôles, mais c’est souvent fait en dépit du bon sens et de l’efficacité.

 

Dans la pratique

 

C’est très compliqué de suivre les règles, parce qu’elles ne sont tout simplement pas adaptées. Dans le cas d’un hôtel par exemple, les normes ont été établies dans le respect de l’environnement et des conditions de travail des employés. Cela signifie avoir des formations, des outils adaptés à chaque tâche, des contrôles. C’est plutôt positif mais les petits hôtels au personnel réduit ne peuvent simplement pas suivre le rythme de ces tâches administratives supplémentaires. Si ces règles ne sont déjà pas adaptées aux petits hôtels, elles sont quasiment impossibles à respecter pour un logement particulier, sur Airbnb ou Booking.

Lire aussi : Comment monter un hôtel en Colombie

 

Pour la commercialisation d’aliments, les lois sont nombreuses aussi. Pour un restaurant ou un café, les inspecteurs vont vérifier les règles d’hygiène, stockage de nourriture, équipements, nettoyage. Cela va de vérifier le bon fonctionnement des frigos aux couleurs des sacs poubelles de recyclages. Sans oublier la civière obligatoire que vous n’utiliserez jamais, car déplacer un blessé est risqué et vous laisserez de toute façon les médecins urgentistes s’en charger.

 

Quant aux transferts internationaux. Il faut aussi être très prudent et prévoyant avec les transferts d’argent. Entrer de l’argent en Colombie est relativement aisé, mais en sortir est très compliqué. Un non-résident, qu’il soit colombien ou étranger, doit déclarer ses actifs, argent ou propriété, comme investissement étranger. S’il ne l’a pas fait, il ne pourra pas envoyer de l’argent à l’extérieur, ou alors il devra s’acquitter d’un impôt de 35%. Beaucoup d’étrangers peuvent se retrouver coincés parce qu’ils n’ont pas remplis le formulaire adéquat lors de l’achat d’une maison ou d’un commerce. Il faudra donc trouver des solutions alternatives.

Lire : Comment envoyer de l’argent en Colombie

 

Les banques ont aussi la fâcheuse habitude de rajouter des frais sur n’importe quel service. Un retrait au bancomat, un transfert, un payement, chaque opération a des frais pas si anodins. Un transfert sur un compte d’une autre banque peut coûter le prix d’un plat du jour (8’000 pesos).

Avec tous ces frais, en plus d’une TVA (IVA) de 19%, le troisième plus élevé d’Amérique latine, pas étonnant donc que beaucoup de gens continue à régler leurs transactions en argent liquide.

 

Comment s’en sortir ?

 

Le meilleur conseil que j’ai, est de bien s’entourer. Avoir un bon comptable et un bon avocat peut faire toute la différence. Selon votre activité économique, former un réseau d’entraide avec d’autres professionnels dans le même secteur est aussi essentiel. À priori c’est évident mais pour quelle raison ?

Parce qu’au milieu de toutes ces lois, c’est très facile de prendre le mauvais chemin qui aura des conséquences désastreuses. Un avocat, un conseiller de la Chambre de Commerce, un banquier, un agent immobilier peut vous créer de gros problèmes même involontairement, par méconnaissance.

 

Par exemple, les entreprises couvrent le 85% des finances de l’état. Les entreprises sont fortement taxées, jusqu’à 65% des revenus en théorie, même si on estime qu’elles payent réellement 35%. Dans la mesure du possible, il est préférable de s’enregistrer sous le régime simplifié (persona natural) qui n’est pratiquement pas taxé. Tant que le commerce ne génère pas des revenus élevés, il faut s’y maintenir à tout prix.

Évaluez bien si votre activité a besoin d’un local commercial, visible, pour recevoir des clients. Une agence de voyage peut avoir un local ou simplement un bureau, voire même être au domicile privé. Les impôts ne sont pas les mêmes, tout comme les équipements.

Dans le cas de la production d’aliments, réfléchissez si un local de vente est vraiment nécessaire pour commencer. Si vous livrez vos clients, qui sont des hôtels, restaurants ou des commandes en ligne, n’ouvrez pas de local avec vitrine. Vous aurez des contraintes et impôts supplémentaires sans aucuns bénéfices. Dans le pire des cas, des vendeurs habiles peuvent vous forcer la main à acheter des équipements, obligatoires selon la loi mais qui ne vous concerne en fait pas. Soyez bien au courant de ce qui s’applique dans votre situation.

Les villes, les zones industrielles, la campagne ou les villages n’ont pas non-plus les mêmes règles. Selon ce que vous produisez, vous pourriez avoir tout avantage à vous éloigner des villes pour être plus tranquille, avoir une meilleure marge de manœuvre.

 

Pour résumer la situation, plus vous payez d’impôts, plus vous attirez l’attention. Ce qui n’est franchement pas idéal, surtout quand on démarre. Avant de faire quoi que ce soit, assurez-vous d’avoir choisi la meilleure option. Ne vous lancez pas aveuglement, de mauvaises décisions peuvent vous entrainer dans une spirale dont il sera très dur d’en sortir.

Admettons que votre commerce fonctionne bien et est en passe de devoir changer de régime fiscal. Préparez bien le moment et la manière avec votre comptable. Payer plus d’impôts vous obligera peut-être à devoir augmenter vos prix. Si les revenus ou la rentabilité baisse vous n’aurez pas la possibilité de revenir en arrière. Une solution pourrait être de ne pas changer de régime et payer une amende à la place, ce qui limiterait les conséquences d’un changement trop anticipé.

 

En conclusion

 

Bien sûr qu’il faut respecter les lois et les règles de votre pays d’adoption, quel qu’il soit. Vous ne voudriez pas vivre dans l’angoisse de perdre ce dont vous avez mis des années à monter. Mais gardez en tête qu’elles ne sont pas spécialement faites pour développer le tissu économique ou protéger le citoyen.

En général, des alternatives existent mais il faut les chercher. Vous vous souvenez de la taxe de 35% pour envoyer de l’argent qui n’avait pas été enregistré comme « investissement étranger » ? Et bien, trouvez un acheteur qui puissent vous payer à l’étranger. Il vous faudra payer les impôts normaux de la vente du bien immobilier et déclarer que le payement a été réalisé à l’extérieur, mais c’est légal. Vous évitez donc cette perte sèche de 35%.

Renseignez-vous bien. Même un bon avocat peut faire des erreurs, juste parce qu’il ne connait pas les lois dans un cas bien précis, le vôtre.

 

Ces choses illégales que nous faisons quand même

 

Il y a peut-être certaines illégalités que nous faisons quand même, sans le savoir ou sans y prêter attention.

Malgré sa large diffusion, Uber est illégal en Colombie. C’est d’ailleurs bien pour ça que le chauffeur vous demandera de vous assoir devant. Ça attire moins l’attention de la police ou des taxis légaux. N’imaginez pas une seule seconde louer votre voiture à un chauffeur pour qu’il travaille sur Uber. Déjà, le contrat n’aura aucune valeur. Pire encore, s’il disparait avec, la police ne classera pas l’affaire comme vol mais abus de confiance car vous lui avez donné les clés et les papiers du véhicule. Vous êtes bon pour monter l’enquête vous-même.

Boire une bière dans la rue ou un parc publique est illégal aussi. Selon le nouveau code de police, vous ne pouvez pas boire de l’alcool dans un lieu public. Donc, si vous avez bu une bière sur le trottoir en face de chez vous ou de l’épicerie, vous étiez amendable.

Conduire avec un permis français alors que vous êtes titulaire d’un visa V, M ou R. Comme vous n’êtes pas touriste, vous avez 3 mois pour obtenir le permis colombien. Passé ce délai, vous ne vous sortirez pas indemne d’un contrôle routier.

2 Replies to “Doit-on respecter et suivre les lois en Colombie ?”

  1. Bonjour merci pour toutes ces infos super intéressantes, claires et précises!!!
    Petite question : est ce que le permis international fonctionne en colombie ? plutôt que de passer le permis colombien ? Que conseillez vous ?
    Avez vous des contacts sur Cartagène (comptable, banquier, location d’appartement 🙂 ?

    1. Bonjour
      non, le permis international n’est pas reconnu. Les permis étrangers sont acceptés pour les touristes, mais un résident doit faire le permis national colombien.
      Je n’ai pas de contact sur Carthagène malheureusement

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