Travailler en Colombie comme indépendant

Travailler en Colombie comme indépendant

Travailler en Colombie est un vaste sujet et nous ne sommes pas trop de trois blogueurs pour l’aborder. Je partage ici mon expérience tandis que Doniphane du blog Colombianito et Victor du blog El Franchute partage la leur. 3 expériences, 3 regards, 3 régions différentes ; Cali, Barranquilla et Bogotá. Ne manquez pas de lire leurs articles ainsi que leurs commentaires à la fin de celui-ci.

Lire l’article de Doniphane : Travailler en Colombie les conseils

Lire l’article de Victor : Recherche de travail en Colombie

 

Indépendant – Freelance

 

Mon expérience est uniquement en tant qu’indépendant, je n’ai jamais été employé dans une entreprise colombienne. Mes conseils seront donc plus orientés sur l’organisation, les contacts avec les clients et les employés.

J’ai une entreprises SAS légalement constituée, pour raison de visa à l’époque, et je travaille depuis la maison. Je me déplace pour rencontrer des clients et maintiens le contact par téléphone et email le reste du temps.

Lire aussi : Où et comment investir

 

Gérer le lieu

 

Travailler depuis la maison a de grands avantages, le plus évident est l’économie d’un loyer. Pas besoin de louer un local commercial si vous ne recevez pas de clients à vos bureaux et n’avez pas d’employés.

Quand j’offrais des solutions industrielles de sécurité antichute, je devais de toute façon aller sur place visiter les installations du client. À aucun moment, les clients ne montraient le besoin de venir à mon bureau. Malgré tout, j’avais un accord avec l’entreprise-partenaire qui installait les systèmes, qu’en cas de besoin je pouvais utiliser leur salle de réunion. C’est une bonne alternative, quand parfois un client de « passage à Cali » profite pour connaître l’entreprise.

Les apparences sont importantes et quelqu’un qui n’a pas d’autre bureau que celui de sa maison ne projette pas une image de réussite. Peu importe les raisons parfaitement justifiées d’économies, pratique et gain de temps. Ceci dit, beaucoup d’entreprises louent un appartement qu’ils arrangent en bureau, le problème n’est pas là. Mais si vous vivez également dans cet appartement, rien de la vie privée ne doit être visible aux clients ou même fournisseurs.

Gardez vos affaires privées dans la chambre uniquement, qui restera fermée pendant les heures de bureau. Ne laissez pas les assiettes du petit-déjeuner ou déjeuner dans l’évier par exemple.

 

Espaces coworking

 

Une excellente alternative est l’espace coworking. Vous avez tous les avantages d’un bureau commercial à un coût inférieur. Les développeurs web en raffolent.

Vous pouvez louer un poste de travail (station) par personne, donc seulement pour vous mais aussi par employé de votre business. Un certain nombre d’heures par mois, vous avez droit aux différentes salles de réunion que vous réservez pour recevoir vos clients par exemple. Vous pouvez aussi vous en servir comme adresse de correspondance de votre entreprise.

Un autre avantage est de connaître d’autres professionnels pour se donner des coups de main. Un programmeur qui bloquerait sur un problème pourrait peut-être demander à un autre programmeur présent pour l’aider immédiatement, à ses côtés.

Le désavantage est quand même le prix. À partir de 3 personnes, cela devient aussi cher que de louer un appartement.

El Lab à Cali est très professionnel avec une très bonne dynamique.

Espace coworking Cali El Lab

Espacio coworking El Lab Cali

 

Gérer le temps

 

Une des grosses difficultés d’être indépendant est d’être efficace et séparer le temps de travail avec le temps privé.

La maison offre beaucoup trop de distractions et Internet est le premier danger. En travaillant seul vous pouvez lire les journaux, consulter les réseaux sociaux et regarder des vidéos sans aucune gêne. La cuisine est aussi une tentation. Chercher quelque chose à grignoter est chaque fois une interruption et une perte de rythme de travail.

L’idéal est bien entendu d’avoir une pièce dédiée au travail. Personne ne devrait vous déranger tant que vous y êtes et vous devriez éviter d’en sortir inutilement. Cherchez aussi à ne pas consulter le téléphone constamment. Toutes les notifications de nouveaux messages sont autant d’interruptions de concentration. Mettez-le en silencieux ou même en mode avion pendant des périodes d’une ou deux heures.

Si vous n’êtes pas efficace depuis la maison, envisagez un espace coworking ou simplement d’aller parfois dans un café. Même si internet reste une distraction elle en sera limitée.

 

Gérer la routine et l’ennui

 

Passer de longues heures seul dans le même environnement du lever au coucher est difficile. La motivation s’en fera automatiquement ressentir. Il faut chercher à alterner le temps de travail à la maison et le temps à l’extérieur.

Même si votre business se passe en ligne, il faut sortir rencontrer des gens. Il faut élargir le réseau de connaissances professionnels, être au courant des nouveautés, de ce qu’il se passe autour de nous. La Colombie fonctionne énormément par relations, ça ouvre des portes et ça donne aussi de nouvelles idées.

En plus, l’énergie et enthousiasme des colombiens pour l’entrepreneuriat est très encourageant, ça serait dommage de s’en isoler.

Travailler depuis la maison

 

Gérer l’argent

 

Être indépendant oblige à être prudent avec les dépenses. L’argent part vite et il y a toujours des dépenses imprévues.

Bien souvent, il faut rendre plusieurs fois visite à un client potentiel avant de signer un contrat et lors de l’exécution aussi. Le budget téléphone et internet pèse lourd et il faudra payer la sécurité sociale.

En plus de ça, les colombiens aiment projeter l’image de réussite et de rang social. Ce qui voudra dire être bien habillé, idéalement avec des jolies chemises portant le logo de l’entreprise.

Il faut être prudent avec les politiques de payement des grandes entreprises qui peuvent facilement passer les 60 jours et n’acceptent pas des versements d’acompte. Certaines sont aussi mauvaises payeuses et font tout pour retarder l’échéance. Il faut donc prévoir des réserves suffisantes pour tenir lors de cette attente.

En tant qu’indépendant (persona natural) les impôts sont bas mais au travers d’une entreprise SAS (persona juridica) les impôts sont de l’ordre de 35%. Il faudra forcément en tenir compte en gardant des réserves et ne pas tout dépenser. Pensez à faire un budget.

Lire : La Colombie n’est pas bon marché

 

Gérer les relations professionnelles

 

Comme vu précédemment, il est important de sortir et rencontrer des gens. Le réseautage ouvre des portes.

Vous verrez qu’il n’est pas impératif de parler parfaitement espagnol. Bien sûr, il faut avoir un niveau suffisant pour pouvoir parler de la pluie et du beau temps mais aussi certains termes plus techniques, propre au business. Si vous vendez du vin par exemple, vous devez forcément maitriser le vocabulaire propre aux caractéristiques du vin mais aussi celui des conditions d’importation et registre sanitaire.

Connaître certains mots de vocabulaire régional va augmenter votre capital-sympathie. Cela démontre votre intégration et identification à la région. Tout comme être au courant de l’équipe de foot ou des chanteurs qui feront tomber les différences. Les colombiens sont de toute façon ravis de rencontrer des étrangers et vous recevrez un accueil chaleureux, mais faire du business est une étape ô combien supérieure. Il faudra démontrer votre capacité et vaincre la concurrence comme tout un chacun.

Tâchez aussi de vous rendre à des foires, des expositions et différents évènements que propose la chambre de commerce de votre ville pour rencontrer des professionnels.

Lire aussi : La communication commerciale avec les colombiens

 

Gérer les employés

 

Même comme indépendant, sans bureau, on peut arriver à avoir des employés. Pour s’occuper de mon agenda culturel en ligne, j’avais une personne à Cali et une autre à Bogotá. Chacun travaillait depuis la maison et nous nous réunissions dans un café ou sur Skype pour nous mettre à jour.

Autant à Cali cela a bien fonctionné car nous nous voyions régulièrement pour évaluer les objectifs et maintenir une formation, autant à Bogotá pas du tout. Finalement, plus que la distance, cela avait beaucoup à voir avec la personnalité. En fait, comme partout, il faut définir des objectifs clairs et avoir les moyens d’évaluer le travail. Il est très important de pouvoir calculer le temps effectif de travail et le contenu.

Le temps de travail est de 48 heures par semaine. C’est long et pratiquement impossible d’être productif sur d’aussi longues durées, il faut donc trouver un juste équilibre entre le travail et le temps de détente sur le lieu de travail même. Laisser des horaires libres à ceux qui travaillent à domicile, créant du contenu internet par exemple, est quasiment voué à l’échec. Les employés auront toujours un empêchement, une urgence familiale, des payements à faire pour expliquer qu’ils ne sont pas au travail et qu’ils s’en occuperont plus tard dans la journée ou soirée.

Vous pouvez recruter des candidats sur la page CompuTrabajo qui est très efficace et bien faite. Attendez-vous à recevoir des centaines de candidatures, mais heureusement la page aide à sélectionner ceux qui correspondent au profil recherché. Sinon faites marcher vos relations, demandez autour de vous qu’on vous recommande des candidats.

 

Gérer les permis de séjour

 

Encore une dernière chose mais pas des moindres. Si vous travaillez sur Internet, comme rédacteur web ou professeur en ligne, vous aurez toutes les peines du monde à justifier les raisons pour obtenir un visa. Le visa pour indépendant est fait pour ceux qui développent une activité professionnelle utile au pays.

On peut débattre sur le fait que gagner des Euros à l’extérieur pour les dépenser en Colombie est utile à la croissance économique, le Ministère des Relations Étrangères n’est de toute façon pas sensible à cet argument. Il vous faudra soit justifier d’une activité en Colombie, soit monter une SAS avec laquelle vous factureriez vos clients à l’étranger. Consultez bien les conditions et si vous entrez dans les critères, au risque de devoir quitter le pays après les 180 jours autorisés du permis touristique.

Lire : Les visas pour la Colombie

Lire aussi : Constituer une SAS

 

Le point de vue de Doniphane (Colombianito)

 

Ayant moi aussi créé une SAS en Colombie et développé ma propre activité je rejoins Sebastien sur de nombreux points. L’aspect vestimentaire, l’image que les colombiens cherchent à projeter d’eux même et l’importance donnée à certaines choses qui pourraient paraitre superflues en Europe sont ici des éléments à ne pas négliger. Je me souviens d’ailleurs de l’un de ses autres articles ou il expliquait que se déplacer à vélo serait perçu comme un mode de vie sain et dynamique par un européen tandis qu’ici en Colombie cela pourrait être synonyme de pauvreté. (Ndlr : j’en parle dans le choc culturel) Il faut donc bien comprendre que la Colombie et la façon d’y faire des affaires sont bien différentes de ce que vous avez pu expérimenter dans d’autres régions du monde.

Il serait très mal vu de vous présenter en t-shirt, en claquettes ou en pantacourt dans certains lieux et ce, même si la température avoisine les 40 degrés. Impensable aussi de ne pas avoir le dernier smartphone à la mode et de ne pas être présent sur certains réseaux sociaux. L’image de marque est ici primordiale.

En ce qui concerne le réseau professionnel je crois qu’il est primordial de comprendre que certains secteurs colombiens fonctionnent en circuit fermé. Il est très difficile de pénétrer certains marchés sans y avoir un contact ou un ami proche. Les colombiens ne font que peu confiance aux nouveaux venus. On parle ici de « palanca » (piston).

Dans tous les cas il faut être prêt à traverser quelques crises existentielles au moment de venir s’installer, travailler et/ou créer son propre business en Colombie. Nous avions déjà évoqué ce thème il y a quelques temps : ma plus grosse déception commerciale en Colombie.

Pour conclure, s’imposer une barrière entre vie professionnelle et vie personnelle est l’un des facteurs clés du succès. Faire des affaires avec des amis ou des proches est la pire idée qui pourrait vous traverser l’esprit. C’est d’ailleurs l’une des principales erreurs que commettent les entrepreneurs qui s’expatrient en Colombie au moment de lancer leur projet.

Pour découvrir mon article sur le monde du travail colombien : travailler en Colombie.

 

Le point de vue de Victor (El Franchute)

 

Je pense que l’article de Sébastien donne une foule de conseils précieux et applicables dans le monde entier pour tous ceux qui souhaiteraient se lancer dans l’aventure du freelance ou du travail depuis sa maison. J’ajouterais que tous ceux-ci s’appliquent très bien pour ceux qui font du télétravail.

Cependant il est vrai que certains aspects sont très spécifiques à la Colombie. Notamment l’image renvoyée. Je me rappelle avoir travaillé à Barranquilla comme commercial et il fallait chaque jour adapter son apparence aux clients qu’on allait visiter. En effet dans le « centre » de la ville (quartier plus pauvre) ils n’apprécient pas de voir un fournisseur arriver habillé en « pingouin ». A contrario il est impensable d’aller voir les clients des zones plus aisées sans une chemise et un pantalon, même par de fortes chaleurs comme le dit Doniphane.

Je rejoins également Sébastien sur l’importance d’insister auprès des Colombiens lorsque l’on fait du business. Afin de signer un contrat, il faudra aller voir 3,4 ou même 5 fois la personne pour bien lui rappeler que vous existez et que vous avez une offre. Et il en sera de même pour recevoir votre paiement. Il m’était habituel lorsque j’étais commercial d’aller voir 3 fois un client avant qu’il me paye. Parfois il donne un peu à chaque visite, il faut adapter son activité à tout cela.

Lire l’article de Victor : Recherche de travail en Colombie

 

2 Replies to “Travailler en Colombie comme indépendant”

  1. Super article, merci les gars !
    J’ai démarré aussi comme freelance ici en Colombie (création site web, marketing digital,…) … et je me revois bien à travers cet article.
    Puis à force de (bonnes) rencontres, je suis passé en mode agence web avec un autre français… et nous sommes justement en plein recrutement de nouveaux talents (français idéalement) afin d’assumer la charge de travail en croissance. J’en profite donc pour partager nos offres aux membres de ce super blog : https://www.gradiweb.com/recrute/

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